La motivation et l’utilisation de la dopamine
Le manque de motivation est l’un des principaux facteurs mentionnés lorsqu’il est question d’échec à une remise en forme ou encore pour adopter de saines habitudes de vie. Et si la motivation en soi n’était pas le problème? Mais que c’étaient plutôt les facteurs liés à la résistance aux changements?
Dans cet article nous aborderons 4 facteurs à prendre en considération lorsqu’on veut faire un changement dans notre vie et s’assurer que la motivation sera au rendez-vous.
Premièrement, il y a le niveau de dopamine disponible. Ensuite la récompense obtenue, l’utilisation d’une habitude pivot et le regroupement d’action entourant la nouvelle habitude.
Les habitudes ne sont pas innées mais apprises.
Saviez-vous que 70% de notre personnalité est formée de nos habitudes?
En effet, les habitudes ne sont pas innées mais apprises. Alors, il est possible d’adopter de nouvelles habitudes grâce à la neuroplasticité des cellules du cerveau. C’est-à-dire leur capacité à se modifier à la suite d’un stimulus. Notre cerveau peut s’adapter et se modeler aux habitudes que l’on désire mettre en place.
La perception du plaisir grâce à la dopamine.
Tel qu’expliqué dans l’article précédent, une personne ayant un niveau élevé de dopamine sera prête à fournir un effort et ressentira de la satisfaction à la suite du travail accompli. Inversement, un niveau de dopamine bas révèle une personne sans énergie qui ne voudra pas prendre action et cela amènera une fermeture d’esprit.
Ces descriptions des niveaux de dopamine sont directement reliées à des tâches. Ce qui veut dire qu’une personne peut avoir un niveau élevé de dopamine en mangeant un bon repas et un très bas pour laver la vaisselle ! Pourtant, même si notre niveau de dopamine est bas, nous la lavons quand même car on est conscient des bénéfices que nous en retirerons. La cuisine sera propre et bien rangée donc nos efforts seront récompensés !
Il faut garder à l’esprit que tout est relatif, teinté de subjectivité et influencé par notre conscience. Nos processus conscients sont une des méthodes d’approche pour identifier et améliorer nos niveaux de dopamine ! Le continuum de la motivation représente où l’on se situe dans nos processus conscients.
Le continuum de la motivation
L’état de motivation est loin d’être noir ou blanc, il fluctue plutôt selon un continuum allant de l’amotivation à la motivation intrinsèque.
Le tableau suivant explique les différents états de la motivation et démontre la quantité de « friction » ou de résistance que notre système éprouvera lors de l’adoption d’une nouvelle habitude. Plus on s’approche de l’état d’amotivation, plus la friction sera grande. Inversement, l’état de motivation intrinsèque indique que l’habitude est bien ancrée et faite de façon automatique.
Niveau de motivation
Amotivation | Je ne vois pas pourquoi je ferais cette tâche. Cela ne m’apporte rien. |
Externe | Je fais cette tâche dans le but de recevoir une récompense ou d’éviter une punition. La motivation est instrumentale. |
Introjection | Je suis motivé par la culpabilité ou pour prouver qu’on a une valeur. Je vis une pression consciente et inconsciente. |
Identifiée | Je fais cette tâche car c’est un choix conscient, c’est important pour moi, même si c’est difficile. |
Intégrée | Je fais cette tâche car c’est cohérent avec mes valeurs, mes besoins. Ça fait partie de moi. |
Intrinsèque | Je fais cette tâche par plaisir et j’en retire une satisfaction. |
D’ailleurs, êtes-vous curieux de connaître votre niveau de motivation pour certaines tâches? Essayez ce questionnaire, il pourra vous éclairer.
Évidemment lorsqu’on pratique de l’activité physique, nous n’avons pas tous la motivation au même niveau. Par exemple, une personne pourrait avoir un niveau élevé de dopamine en ski de fond mais très bas à la course à pied.
Maintenant, analysons les avantages et les inconvénients de deux personnes ayant des niveaux de motivation différents mais avec le même objectif. Celui d’intégrer d’une nouvelle habitude de vie pour améliorer leur santé cardiovasculaire en effectuant des entraînements de course à pied.
Motivation externe : avantages et inconvénients
Paul a une motivation basée sur les objectifs, autrement dit, il se situe dans l’état de motivation externe. Il fait de la course à pied trois fois par semaine parce que son kinésiologue lui a dit que c’est ainsi qu’il améliorera sa santé cardiovasculaire.
Paul utilise une application qui le félicite à chaque course et lui donne une récompense à la manière des jeux vidéo. Il fait de la course, car il se sent obligé, sinon il vit de la culpabilité et de la pression sociale s’il n’accomplit ses trois séances de course par semaine.
Les avantages pour Paul d’avoir une motivation externe c’est:
- Très simple. « Dis-moi ce que je dois faire et je le ferai. »
- Facilement mesurable
- Une bonne façon de garder un œil sur son progrès.
- Une méthode qui est très bien pour les débutants à l’entraînement.
Mais l’objectif est d’évoluer rapidement vers le stade de motivation intrinsèque afin de consolider cette habitude.
Les inconvénients de la motivation externe, c’est qu’elle provient souvent de la culpabilité plus que du plaisir. Qu’elle est engendrée par une pression sociale qui rend l’expérience négative en cas d’échec. La motivation externe implique très peu le cerveau émotionnel ou le sens identitaire de la personne.
En accordant plus d’importance à la récompense tel qu’un trophée, l’acceptation sociale ou l’approbation de son kinésiologue plutôt qu’à l’effort effectué, Paul sabote ses chances de consolider cette habitude.
Autrement dit, ce serait plus riche et sain pour Paul et son niveau de dopamine si sa motivation provenait de lui et qu’elle faisait partie de son identité plutôt que lorsqu’elle provient des pressions exogènes.
Motivation intrinsèque : avantages et inconvénients
De son côté, Jacques a une motivation basée sur son identité qui appartient à l’état de motivation intrinsèque. Il aimerait être plus en forme et, afin d’améliorer sa santé cardiovasculaire, il décide de pratiquer la course à pied. Jacques se sent bien, durant et après ses courses, car il est content des efforts fournis, même si c’est souffrant parfois! Il est conscient qu’au final il le fait pour sa santé.
Les avantages d’être à l’état de motivation intrinsèque c’est :
- Qu’il y a beaucoup plus de probabilité de succès sur le long terme.
- Cela amène la personne dans une ouverte d’esprit qui laisse place à l’apprentissage.
- L’objectif ultime est plus large, plus global ou plus identitaire faisant appel aux émotions, aux comportements et à la personnalité de la personne. Cela va au-delà des 3 séances de course à pied prescrites par le kinésiologue.
- Aucune validation sociale n’est nécessaire car Jacques fait les efforts pour lui.
À ce niveau de motivation, Jacques n’a pas besoin de récompense d’une application. La récompense c’est l’effort qu’il fournit. Ainsi, ses habitudes sont plus solides face aux imprévus et au stress de la vie quotidienne.
Afin de parvenir à passer de l’état de motivation externe à interne, cela demande une autoréflexion. Cela demande BEAUCOUP d’efforts pour entamer un changement et le maintenir. Il faut se poser les vraies questions sur son identité :
Qui suis-je? | Comment je veux vivre? | Comment je veux me sentir?
La résistance au changement
La friction limbique est le terme donné par le Dr. Huberman pour décrire l’effort nécessaire pour affronter deux états.
- L’état anxieux qui active le système nerveux et le met en état d’alarme.
- L’état de fatigue qui amène le corps à ralentir et se préparer au repos.
Ces états nous désavantagent vis-à-vis l’adoption de nouvelles habitudes puisqu’ils représentent les extrêmes.
Le juste milieu serait un état calme, mais éveillé, où l’on retrouve une belle activation du système nerveux tout en conservant un focus qui permet de prendre des décisions plus difficiles et d’être ouvert à l’apprentissage!
La quantité de friction limbique est très déterminante dans le succès de la formation d’une habitude. Moins une personne vit de résistance et plus son habitude sera consolidée.
La friction limbique est utilisée pour caractériser la résistance physique, émotionnelle et comportementale qu’il faut combattre pour accomplir ladite habitude. Ce ne sont pas des excuses, de la paresse ou encore de la procrastination. La friction limbique est plutôt une sensation qui résulte en un comportement. La zone limbique du cerveau est la région qui gère les émotions et les comportements, c’est pourquoi la naissance de nos habitudes de vie s’y trouve.
Comment réussir à adopter une nouvelle habitude de vie
Vous savez maintenant qu’accorder trop d’importance aux résultats sabotera vos chances de réussite.
Le cortex cérébral, plus précisément notre lobe frontal, colore nos expériences de perception, d’appréciation subjective et de connaissances. Il faut donc changer notre façon de voir les choses, en d’autres mots, il faut savoir se parler un peu! Ce qui est difficile c’est l’effort et non pas le résultat. Alors, c’est plutôt sur l’effort que l’on devrait se concentrer. En modifiant nos pensées et notre attitude face aux efforts nécessaires nous établissons une base saine pour entamer un changement durable.
Voici quelques conseils judicieux pour rendre l’adoption d’une nouvelle habitude plus facile!
1. L’habitude pivot
Une bonne façon d’adopter une nouvelle habitude est de se concentrer sur une habitude pivot. Cette dernière est une habitude positive qui va nous aider à accomplir la nouvelle habitude.
Par exemple, s’entraîner (habitude pivot) vous motivera à adopter une alimentation plus saine (nouvelle habitude). Car les études ont démontré que les personnes s’entraînant régulièrement ont tendance à adopter une alimentation saine
2. Le regroupement d’action
Le cerveau a une mémoire qui fonctionne en effectuant des regroupements. Cela veut dire qu’on apprend des habitudes en mémorisant une certaine combinaison d’actions. Ces actions précèdent et suivent ladite habitude.
Il est rapporté que pour affecter une nouvelle habitude, il est primordial de réviser le regroupement d’actions qui la précède et qui la suivent.
Par exemple, si vous voulez créer une nouvelle habitude de vous entraîner durant l’heure du dîner, il est préférable que le matin même, tout votre équipement soit déjà préparé.
Un autre exemple par rapport à l’adoption des saines habitudes alimentaires serait de choisir des aliments sains à l’épicerie. De cette façon, quand vient le moment de cuisiner, on ne pourra pas dire « qu’il n’y a rien de bon dans le frigo »!
3. Éviter les montagnes russes avec la dopamine
Notre corps lutte à longueur de journée afin d’atteindre et maintenir l’homéostasie qui est l’état d’équilibre. Lorsqu’on éprouve du plaisir, il y a une hausse accrue du niveau de dopamine. Par conséquent, lorsque l’on souffre le niveau de dopamine est très bas.
En somme, voyez le plaisir et la souffrance comme le ying et le yang. Si vous avez une forte augmentation de plaisir, attendez-vous à avoir une réponse égale en souffrance qui suivra. De ce fait, un relâchement important de dopamine dans le cerveau sera suivi d’une chute importante de dopamine dû au principe de disponibilité.
Évitez les hausses de dopamine juste avant ou après votre effort en lien avec votre nouvelle habitude.
La Dr. Anna Lembke, psychiatre, témoigne de l’équilibre de la dopamine dans la société actuelle ( Dr. Anna Lembke: « Your behavior will reset 100% »).
Faites également attention aux nombreuses actions qui peuvent saboter votre motivation et vos efforts. Une nouvelle habitude ne devrait pas nécessiter trop de « couches » de dopamine pour avoir la motivation de faire votre tâche.
Par exemple, une personne ayant besoin de prendre deux cafés avant son entraînement et nécessitant absolument sa musique préférée ajoute des conditions à respecter pour être en mesure de passer à l’action. La dopamine n’est pas illimitée alors réservez-la pour votre effort.
En conclusion, votre mantra devrait être « L’effort est ma récompense. »
Justine Lai
Kinésiologue
Sources:
- On the hierarchical structure of self-determined motivation : A test of top-down and bottom-up effects. Personality and Social Psychology Bulletin, 29, 992-1004, Frédéric Guay, Geneviève Mageau, & Robert J. Vallerand.
- https://mcgovern.mit.edu/2018/02/08/distinctive-brain-pattern-helps-habits-form/